Ras-le-bol chez les directions générales

16 septembre 2013 par Michel Bernard

Lettre ouverte du  président de l’Association des directions générales des commissions scolaires du Québec. 

 

Nous sommes estomaqués et outrés de voir la première ministre et la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport jouer la carte de l’étonnement. Quelle mouche a piqué la première ministre ? C’est précisément son gouvernement qui a sous-traité l’augmentation des taxes aux commissions scolaires dans son budget de novembre 2012 et ce, après avoir adopté une loi nous y obligeant.

En décrétant de nouvelles rondes de compressions, le gouvernement Marois a choisi de nous faire porter l’odieux de la hausse auprès des contribuables. Et aujourd’hui, pour se faire du capital politique, il déchire sa chemise sur la place publique et casse du sucre sur le dos de la gestion des commissions scolaires, des proies faciles me direz-vous. L’opération est cousue de fil blanc et nous refusons de nous faire instrumentaliser de la sorte alors qu’on respire de plus en plus ce parfum électoral.

Au cours des derniers mois, la ministre de l’Éducation nous suggérait de réduire nos dépenses, de puiser dans nos surplus ou d’augmenter nos revenus. Or, il apparaît évident que l’exercice de réduction des dépenses a déjà été mené à plusieurs reprises et que les paramètres de la loi nous empêchaient de recourir à nos surplus. Au final, le gouvernement a placé les commissions scolaires devant un choix qui n’en était pas un : il nous a mis devant le fait accompli, en ouvrant la porte au champ de la taxation scolaire pour compenser ce qu’il nous avait déjà coupé de l’autre main. Tout ça pour n’obtenir aucun sou supplémentaire, simplement maintenir la tête hors de l’eau.

Il y a des limites à compresser ce qui n’est plus compressible. Et là, la limite est atteinte.

Le gouvernement savait parfaitement ce qui se tramait : il a déterminé les règles du jeu, posé les balises. Cet été, la ministre a même cautionné publiquement les choix des commissions scolaires, disant qu’ils étaient raisonnables. Quelques semaines plus tard, ce qui était raisonnable ne l’est plus…

Madame la Première Ministre, je rappelle que 80 % de notre budget est consacré à la masse salariale. À moins que vous souhaitiez ouvrir les conventions collectives et charcuter dans les salaires de l’ensemble de nos personnels, je vois mal comment nous pourrions faire des économies dans ce poste budgétaire.

Mais puisque vous êtes « mécontente de la façon [dont] ont travaillé les commissions scolaires », quels services souhaitez-vous couper ? Parce que ce sont des services de nos élèves dont il est question. L’aide aux devoirs ? Le soutien aux élèves en difficulté ? Des écoles dans de petites municipalités ? Des professionnels dédiés à la réussite scolaire de nos enfants ? Le chauffage dans nos écoles ? Je vous mets au défi de nous le dire, car nous sommes trop préoccupés par la réussite de nos élèves pour passer la tronçonneuse dans des services dont ils ont tant besoin.

Depuis trois ans, un demi-milliard a été retranché dans les budgets qui nous sont confiés, dont 200 M$ cette année seulement. Même en abolissant tous les centres administratifs des commissions scolaires, on n’arriverait jamais à récupérer ce 200 M$ qu’on nous réclame.

Et comme le sujet semble à la mode : parlons-en de l’abolition des commissions! Des économies représentant au maximum 6 % de l’ensemble de notre budget… Et encore là! Il faudrait quand même désigner une instance chargée de coordonner la rentrée scolaire de 1,3 million d’élèves dans 2 700 écoles, planifier le transport des écoliers, négocier les ententes, aménager les locaux, assigner les 105 000 enseignants, veiller au bon fonctionnement des systèmes informatiques, coordonner les services de la paie, planifier le maintien des actifs, etc…

Pendant ce temps, les écoles privées s’en sortent indemnes, n’ayant pas besoin, elles, de participer aux efforts pour assainir les finances publiques.

Un Québec pour tous, vous dites ?

Raynald Thibeault