Les commissions scolaires maitres d’oeuvre du plan d’optimisation en FP

31 janvier 2014 par Michel Bernard

Le 4 décembre dernier, la TRÉAQFP a organisé un forum sur la formation professionnelle à Québec. Normand Lessard, directeur général de la Commission scolaire de la Beauce-Etchemin, Camil Turmel, directeur général de la Commission scolaire  des Appalaches et Éric Blackburn, directeur général de la Commission scolaire des Hautes-Rivières ont pris une part active aux échanges. Ils ont  particulièrement insisté sur le rôle déterminant que les commissions scolaires ont joué dans le développement de la formation professionnelle, rôle qu’elles continuent à assumer de façon responsable et efficace et qui devra encore être le leur pour assurer kl’avenir de ce secteur de formation.

Nous publions ci-dessous l’allocution prononcée par M. Éric Blackburn à cette occasion.

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ALLOCUTION DE M. ÉRIC BLACKBURN

LORS DU FORUM SUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE

ORGANISÉ PAR LA TRÉAQFP

QUÉBEC, 4 DÉCEMBRE 2013

 

C’est d’abord un plaisir d’être avec vous ce soir, plaisir doublé du fait de ma contribution à votre réflexion nécessaire, eu égard aux enjeux et défis inhérents à la formation professionnelle. Depuis plusieurs années déjà, le milieu de l’Éducation, dont nous sommes, travaille très fort pour redonner à la formation professionnelle ses lettres de noblesse. On le sait tous, du moins je l’espère, la formation professionnelle est une première porte d’entrée pour nos élèves afin d’accéder au marché du travail, et la formation qui y est offerte, disons-le haut et fort, est de très grande qualité. Longtemps perçue comme une formation de deuxième ordre, la formation professionnelle a assez souffert!   Nos élèves y retrouvent une formation de première qualité au sortir de laquelle des emplois enviables, assortis de conditions de travail reconnues, les attendent.

D’abord, elle est une réponse immédiate aux intérêts et aspirations personnels et professionnels de nos élèves, la mission première à laquelle nous devons répondre. Elle est ensuite une excellente option pour répondre aux besoins toujours grandissants de main-d’œuvre qualifiée, non seulement au Québec, mais dans le monde entier.

–          Suffit-il de rappeler combien d’étudiants étrangers retrouvent aujourd’hui en formation professionnelle réponse à leurs besoins de formation?

–          Suffit-il de rappeler la très grande capacité d’adaptation de notre réseau à rendre disponible aux entreprises et aux personnes toute notre expertise développée, nos ressources et nos infrastructures?

–          Suffit-il de rappeler les efforts déployés par les acteurs du système pour rendre accessible le plus grand nombre possible de programmes sur l’ensemble du territoire du Québec?

–          Suffit-il de rappeler la contribution importante de la formation professionnelle à l’augmentation substantielle des taux de diplomation et à la diminution accrue des taux de décrochage… pour qu’on lui reconnaisse toute son importance dans le développement de la main d’œuvre certes, mais également pour le développement du Québec… pour qu’on lui accorde tous les crédits nécessaires à son actualisation et à son déploiement sur l’ensemble de notre territoire?

En mai 2011, le MELS déposait son plan d’optimisation des programmes d’études professionnelles et techniques. La situation des finances publiques, l’augmentation importante du nombre de personnes prenant leur retraite, la décroissance démographique, les besoins de main-d’œuvre qualifiée, les nouvelles fonctions de travail… la table était mise pour mettre à jour non seulement notre carte de formation, mais également les contenus s’y rattachant. Les employeurs sont unanimes, il y a de plus en plus de place pour une main-d’œuvre qualifiée certes, mais aussi pour une main-d’œuvre plus polyvalente. Et nous en sommes. Pour ce faire, du côté des centres de formation, les défis sont importants. Pour répondre à cette réalité, ils doivent faire face à certains défis.   Les changements qui s’imposent d’eux-mêmes ne sont pas toujours en harmonie avec la réalité de tout ce qui touche l’aspect humain de nos organisations. Le perfectionnement actualisé fait défaut, n’est pas toujours disponible, pas toujours adapté. La formation initiale, quant à elle, se pose comme un chantier en soi, à redéfinir.     

Le plan d’optimisation tel que proposé présente donc des défis et enjeux importants, pour le réseau comme pour la formation elle-même. Nous sommes en accord avec un plan d’optimisation, mais nous souhaitons faire partie de la solution et il est nécessaire d’en anticiper les obstacles à sa mise en œuvre et de se rappeler ce qu’est d’abord la formation professionnelle au Québec.

–          La formation professionnelle est une option pour tous les élèves du Québec, un accès direct à un premier diplôme, autant que l’est le DES.

–          La formation professionnelle contribue de façon notable à l’augmentation du niveau de qualification de la population québécoise.

–          La formation professionnelle contribue également à l’augmentation des taux de diplomation et à la diminution des taux de décrochage. Elle fait partie intégrante de nos conventions de gestion, entre autres pour l’augmentation du nombre d’inscriptions des élèves de moins de 20 ans. Rappelons-nous également au passage que plus de 70 % des élèves qui décrochent de l’enseignement collégial reviennent en formation professionnelle.

–          La formation professionnelle doit, dans la mesure du possible, pour cette raison fondamentale, être accessible et disponible sur tout le territoire du Québec et ce, de façon équitable, équité ne rimant pas nécessairement avec égalité, il va de soi.

–          L’accès à la formation initiale (la formation professionnelle en fait partie), le plus près de son domicile, sur l’ensemble du territoire du Québec, est une valeur fondamentale du système public d’éducation.

–          La formation professionnelle est une formation à valeur ajoutée, elle offre une formation qualifiante reconnue par le MELS, et non pas par les établissements, uniformisée et reconnue par tous les employeurs, sur l’ensemble du territoire du Québec, au contraire des AEC.

–          La Commission des partenaires du marché du travail reconnaît l’importance de l’accès à cette formation sur tout le territoire du Québec.

–          Les services aux entreprises mis en place par les commissions scolaires travaillent en complémentarité à la formation professionnelle, pour augmenter les niveaux de qualification de la main-d’œuvre autant en entreprise qu’en établissement, en harmonie avec les programmes de formation reconnus.

–          Emploi-Québec , également, reconnaît la qualité et la pertinence de la formation offerte par les commissions scolaires.

–          Les référentiels en évaluation  contribuent généreusement à assurer une qualité de formation et une uniformité sur l’ensemble du territoire du Québec.

Ses obstacles :

–          Les programmes d’apprentissage en milieu de travail concurrencent directement la formation professionnelle et les règles d’accès au financement excluent les commissions scolaires, pourquoi?

–          Les AEC offerts par l’enseignement collégial concurrencent de façon déloyale les programmes offerts par la formation professionnelle dont ils s’inspirent trop souvent. Pourquoi laisser faire ça? 

–          Les règles de financement des AEC et leur traitement sont inéquitables en comparaison avec celles imposées aux commissions scolaires. Qu’a-t-on fait pour mériter cela?

–          Les règles actuelles de répartition de la carte des enseignements en formation professionnelle compromettent la réponse aux besoins de main-d’œuvre et l’accès à la formation. Quand ferons-nous partie de la solution?

Le réseau de l’Éducation des adultes et de la Formation professionnelle des commissions scolaires est titulaire d’une expertise de longue date. L’histoire  de l’Éducation des adultes, de la formation professionnelle et des services aux entreprises, le réseau  l’a écrite, l’a vécue. Il a des choses à dire qui méritent d’être entendues, mais surtout écoutées. Le plan d’optimisation des programmes, il y croit également, mais pas à n’importe quel prix.   Les choix à faire sont déterminants. Les enjeux sont de taille et les risques de perdre un joyau en éducation sont importants à ce moment-ci de notre histoire.

Je tiens à rappeler encore et toujours notre disponibilité et notre volonté à contribuer à l’amélioration des programmes de formation et à leur mise en œuvre. Je nous rappelle que nous formons, mais surtout que nous qualifions, un nombre important de jeunes et d’adultes, pour qui nous travaillons quotidiennement.   Toutefois, nous avons besoin de savoir de façon claire où nous nous en allons. Les concepts de Sens et de Pertinence sont fondamentaux en éducation comme en gestion. Les élèves en ont besoin pour réussir, les adultes aussi! Savoir où on va afin de comprendre ce que l’on fait est la base de la mobilisation, de la concertation, du succès. 

L’implication des acteurs du milieu est garante d’un avenir prometteur pour la formation professionnelle et la réorganisation de ses programmes. Les commissions scolaires sont branchées sur les milieux et les entreprises leur accordent beaucoup de crédibilité. Elles sont parfaitement conscientes du contexte actuel en éducation et, malgré la direction des vents et leur vitesse, elles ne perdent jamais leur cap. L’optimisation des programmes d’études en formation professionnelle ne réside pas exclusivement dans leur réorganisation. Elle passe d’abord par les ressources humaines qui les font vivre et elles doivent non seulement être écoutées, leurs points de vue et leurs contributions doivent être considérés. 

Bonne réflexion.

Éric Blackburn est directeur général de la Commission scolaire des Hautes Rivières en Montérégie. Il est membre du Conseil d’administration de l’ADIGECS et responsable du dossier de la formation professionnelle et de l’éducation des adultes.