Parole aux membres

8 octobre 2014 par Michel Bernard

Nous publions le texte de Gérard Tousignant paru aujourd’hui dans la page Débats du journal La Presse. Gérard Tousignant est directeur général du Centre d’élaboration des moyens d’enseignement du Québec. Il a été directeur général de la Commission scolaire de l’Estrie puis de la Commission scolaire intégrée de Coaticook de 1972 à 1995.

Dans le débat actuel sur le financement du réseau public d’éducation et sur le rôle des commissions scolaires, peu de nos collègues retraités prennent la parole. Leur expérience et leur expertise pourraient certes apporter un éclairage sur les différentes dimensions de la situation et contribuer à situer le débat dans une plus juste perspective. Souhaitons que la contribution de M. Tousignant soit suivie de nombreuses autres.

 

Où s’en va le gouvernement?

Premier constat, il y a, pour le moins, apparence de contradiction entre le discours et les décisions. D’une part, le gouvernement dit haut et fort que l’Éducation est une priorité et, d’autre part, il impose des compressions tous azimuts au réseau d’éducation.

Concernant les commissions scolaires, une autre confusion est notée lorsque le ministre de l’Éducation pose comme prémisse que le nombre d’électeurs qui exerceront leur droit de vote déterminera si les commissions scolaires resteront en place ou si elles seront abolies.

Première clarification, les commissions scolaires ne sont pas formées que des commissaires élus, elles comptent des administrateurs pédagogiques, des professionnels, du personnel de soutien et autres. En outre, le rôle des commissions scolaires ne se limite pas à gérer le transport scolaire et les équipements. En cette matière, il est étonnant d’observer que nos politiciens semblent ignorer le rôle de planification, d’organisation et de soutien que les commissions scolaires jouent auprès des écoles.

Deuxième clarification, les commissions scolaires assument la responsabilité de l’École publique. Elles sont les gardiennes du principe fondateur de la réforme en éducation, à savoir l’accessibilité pour tous à l’éducation sans égard à la provenance sociale et au statut économique des élèves.

Troisième clarification, les commissions scolaires constituent des instances permettant aux collectivités locales d’influencer les décisions en matière d’éducation par le vote, bien sûr, mais également par la présence des comités de parents, des conseils d’établissement et autres.

Il y a lieu de s’inquiéter du mouvement de centralisation amorcé par le Gouvernement notamment dans les services sociaux et de santé. Et par les interventions ad hoc du premier ministre et du ministre, il semble bien que le réseau d’éducation risque de se voir imposer un modèle de même nature. Il apparaît pertinent de rappeler qu’au moment de la réforme de l’éducation dans les années 1960, les instances centrales étaient omniprésentes dans les décisions. Les auteurs de la réforme ont voulu démocratiser le système d’éducation en partageant les responsabilités avec les instances locales, notamment les commissions scolaires, en leur accordant des marges de manœuvre dans les prises de décision pour les adapter aux réalités locales.

Le gouvernement fait fausse route en voulant dicter, à partir de Québec, la nature des décisions dans un contexte de compressions. En cette matière, le gouvernement devrait se limiter à préciser les enveloppes budgétaires qu’il met à la disposition des instances locales laissant à celles-ci la prérogative d’interagir avec leur milieu concernant les choix en matière de services prioritaires aux élèves. Ce faisant, le gouvernement donnerait une nouvelle dimension aux élections scolaires.

 Gérard Tousignant